Le Nouveau-Brunswick se trouve à une croisée historique des chemins. Les tribunaux ayant officiellement approuvé le règlement du recours collectif national contre les producteurs de tabac, notre province recevra 614 millions de dollars, à commencer par un paiement initial de 147 millions de dollars. Il s’agit d’un moment charnière. Mais cette occasion unique s’accompagne d’une importante responsabilité : veiller à ne jamais laisser quoi que ce soit nous prendre tout ce que le tabac nous a pris, que ce soit en matière de vies, de santé ou d’argent.
À la base, l’objectif du recours collectif était de récupérer les coûts dévastateurs des besoins en santé causés par le tabagisme. Le tabac coûte encore 152 millions de dollars en dépenses annuelles de santé au Nouveau-Brunswick, et coûte la vie à 1 200 personnes par année dans la province. À l’échelle nationale, le tabac demeure la première cause de maladie et de décès évitables au Canada, faisant 46 000 victimes par année. Ce sont des faits accablants qui doivent définir notre marche à suivre. Nous ne pouvons permettre que les fonds issus du règlement soient utilisés pour des besoins à court terme ou noyés dans les recettes générales. Nous devons être stratégiques et visionnaires. Nous devons protéger ces fonds afin de bâtir un avenir plus sain et sans tabac pour la population néo-brunswickoise.
Nous exhortons le gouvernement provincial à affecter une bonne part des fonds issus de l’entente au renforcement et à l’élargissement de la Stratégie favorisant la vie sans tabac ni vapotage au Nouveau-Brunswick. L’heure est à l’action.
Il n’y a aucune ambiguïté : la nouvelle fondation créée à l’échelle nationale dans le cadre de l’entente conclue avec les producteurs de tabac n’a pas le droit de subventionner des programmes de lutte contre le tabagisme. Les gouvernements provinciaux, dont le Nouveau-Brunswick, ont accepté cette responsabilité. Il est maintenant du devoir de notre gouvernement d’agir. Il faut mobiliser ces fonds pour renforcer la santé publique, et non pour combler les déficits budgétaires.
Les enjeux ne pourraient être plus cruciaux. Aujourd’hui, il y a près de 96 700 fumeurs et fumeuses au Nouveau-Brunswick, soit 15 % de la population adulte : un des taux les plus élevés du Canada. Plus alarmante encore est l’augmentation du nombre de jeunes qui vapotent, laissant entrevoir une nouvelle génération dépendante à la nicotine. Si nous n’agissons pas immédiatement, l’histoire se répétera.
Avec les bons investissements, le Nouveau-Brunswick pourrait améliorer les programmes de cessation, élargir les campagnes d’éducation et de sensibilisation, élaborer des politiques de lutte antitabac plus solides, s’attaquer à la crise du vapotage chez les jeunes et soutenir plus efficacement les unités de santé publique. Chaque dollar dépensé aujourd’hui pour des efforts de prévention et de réduction permettra de sauver des vies et d’économiser des millions de dollars en dépenses pour la santé.
Il s’agit d’un moment décisif. Si nous gaspillons ces fonds, l’occasion ne se représentera pas de notre vivant. Nous devons agir avec prévoyance, détermination et courage.
Nous demandons instamment au gouvernement du Nouveau-Brunswick de faire preuve d’un leadership audacieux et d’allouer les fonds du règlement à la protection de nos jeunes, à la prévention des maladies, à la sauvegarde des vies et à la concrétisation de l’objectif qui sous-tend réellement ces procès contre les fabricants de tabac. Saisissons cette rare occasion d’entrer dans l’histoire en réservant un avenir plus sain et sans tabac aux générations à venir.
Après tout, l’avenir de la santé au Nouveau-Brunswick dépend de ce que nous sommes sur le point de faire. Ne ratons pas notre chance.
Lana Randell est coordonnatrice de la défense de l’intérêt public à la Société canadienne du cancer dans la région de l’Atlantique. Kerrie Luck est vice-présidente des politiques et de la recherche à la Fondation des maladies du cœur et de l’AVC du Nouveau-Brunswick. Melanie Langille est présidente-directrice générale de Poumon NB. Nora Lacey est chef de la participation des médecins et des patients à la Société médicale du Nouveau-Brunswick. |